Archive pour la catégorie ‘La Vie brève’

Où vont les petits lemmings?

3 septembre 2015,

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Cette marche somnambulique vers l’abîme a-t-elle un sens?
Est-ce une manière de préparer une Renaissance ou de laisser la place à d’autres.
L’Evolution n’a pas été avare de tels changements par l’extinction presque totale de formes vivantes devenues inadaptées ou monstrueuses.
La propension lemminguesque, les fantasmagories des transhumanistes devenues réalités,la décomposition accélérée des structures sociales achèveront l’histoire de cette espèce prédatrice et suicidaire, mais qui composa des haïkus,
comme celui-ci

Chats amoureux
Vous oubliez même les grains de riz
Collés à vos moustaches

Taigi

ou cet autre, de Basho traduit par Nicolas Bouvier
Paix du vieil étang
Une grenouille y plonge
Un “ploc” dans l’eau

Ecrit en fin d’après-midi, à la campagne,
en écoutant un prélude de Claude Debussy (La fille aux cheveux de lin)

Encore Hune…

27 février 2015,

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La librairie « La Hune » va fermer, vaincue par les assauts de la Mode-fric. Les Marques, leurs banquiers et leurs mécènes visent maintenant  l’église Saint-Germain des prés, toute proche, dont le ratio: prix du m2/chiffre d’affaires n’est pas fameux…

Le mercredi 7 janvier…

11 janvier 2015,

Chers Amis,honore

Nous avons perdu deux vieux et chers amis de quarante années, assassinés ce mercredi 7 funeste dans la salle de rédaction de Charlie Hebdo.

L’un, Michel Renaud, venu rendre des dessins à Cabu, “invité de la rédaction”, son nom ne lui sera restitué qu’à la fin de la journée, l’autre, Philippe Honoré qu’on oublia dans la liste des dessinateurs tués (on l’oublie encore !) ce qui nous fit espérer qu’il avait échappé au massacre.

Philippe était un vrai ami, délicat, d’une modestie et subtilité aristocratique, que j’admirais dans son art, celui avec qui, à tout moment, même en son absence, on poursuit la conversation commencée il y a quarante ans sur le sens et l’éthique de notre métier de dessinateur et d’illustrateur. Philippe ne transigeait pas avec le dessin, fond et forme liés pour parvenir à l’essentiel, à l’instar des plus grands, des Daumier, Gavarni, des dessinateurs de l’Assiette au Beurre, les Grandjouan, Roubille, Jossot ou Hermann Paul ou plus tard des Frantz Mazerel ou Vallotton dont il avait épousé la rigueur, la force et la puissance des noirs et blancs. (suite…)

Les temps étant venus…

20 décembre 2014,

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Les temps étant venus, d’étranges évènements survinrent…

Dans ce Chaos climatique, les espèces jusqu’alors stables se mélangèrent en de monstrueux accouplements, des gésines incestueuses naquirent des chimères terrifiantes. Les oiseaux recouvrèrent leurs dents perdues il y a 116 millions d’années*. Les ruminants se gavèrent de poissons morts. Le sixième Cavalier de l’Apocalypse fut jeté à bas par sa monture et piétiné rageusement et de sa trompette surgirent virus et bactéries oubliés qui se répandirent avec une virulence accrue …

Au Congrès des « Transhumanistes du 7e jour » qui se tenait dans un hôtel d’une vallée de la Suisse extrème-orientale, un androïde nasillarda que «La Fin de l’Homme annonçait une Renaissance» puis se tut, faute d’énergie.
Les congressistes ne purent finir leur raclette qui resta figée pour l’éternité.

* in Le Monde du 11/12/14

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A la claire fontaine

16 novembre 2014,

 

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Georges n’aurait su dire quelle singulière et irrésistible pulsion l’avait amené là.
Le vieux parc avait été mis en coupe et saccagé, on y construisait des lotissements prétentieux. Des excavatrices, de monstrueuses tractopelles, des défonceuses étaient à l’oeuvre là même où  le Labyrinthe de buis multicentenaire gardait les secrets. Les belles fabriques baroques, la Tente turque et le Mithraeum avaient été démembrés et vendus à des brocanteurs louches.
Le Voyageur l’attendait, le Voyageur était toujours là aux carrefours de sa vie.
Il avait pris cette fois l’aspect d’un instituteur töpfferien, mais on reconnaissait la gouaille ironique et sarcastique du Cynique.
Quand ils sortirent du parc, le 86 venait juste de passer…

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Délestage…

3 novembre 2014,

 

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Alors vint le temps du grand Délestage: les idéologies usées jusqu’à la corde, les principes nécrosés, les pensées arthritiques, les ukases de l’enfance… Georges passait tout ça à la moulinette du doute méthodique.
Quand il ne resta plus rien, Georges alla aux champignons dans le bois Biétri, appelé aussi le bois des morts où s’étaient étripés protestants et catholiques, un hors-d’oeuvre avant la boucherie de 14/18.Il y a des lieux comme ça, prédestinés, il est vrai, mal placés sur la route des invasions romaines, franques, espagnoles et germaniques…(à suivre)

Adagio con spirito…

30 octobre 2014,

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« Une minute affranchie de l’ordre du temps a recréé en nous pour la sentir l’homme affranchi de l’ordre du temps »
Marcel Proust  Le temps retrouvé

Georges nous lut hier de très belles pages
du « Petit éloge du temps comme il va » de Denis Grozdanovitch*,

Tempo lento, adagio con affetto, c0n delicatezza, adagio con spirito…

*Folio-Gallimard

Mise en forme…

15 octobre 2014,

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Lors de ses exercices de mise en forme matinaux, Georges tentait de muscler sa mémoire chancelante en récitant à voix haute et en plein vent la « Prose du Transibérien » , du moins le début, puis il bifurquait vers les morceaux choisis de l’école primaire, les Leconte de Lisle, Albert Samain, José Maria de Hérédia, enfin à court, scandait des onomatopées paléolithiques.

Puis le « silence habité » de la campagne revenait, le halètement lointain d’un tracteur, un chien en chasse, le tintamarre soudain des oies, le vrombissement rotatif d’une débroussailleuse et les hahanements des cygnes survolant le jardin…

Revenu de loin et de tout…

18 septembre 2014,

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Georges renoue avec l’ethnologie de terrain qu’il avait pratiquée à l’âge d’or des années tristes et tropicales.
Il avait à cette époque furtivement rencontré Castaneda, tâté du bourgeon de peyotl, échangé l’herbe du diable et la petite fumée, s’était ensauvagé chez les derniers Ahuracas en voie d’extinction dont il décrivit les moeurs douces et polygames, leur goût pour la paresse et les charades, leur talent pour la commedia del arte et le tango, leur science des herbes et leur anarchisme tranquille. Son livre, illustré d’admirables aquarelles, de dessins, de  croquis savoureux et de planches de botanique, fut ignoré. On l’oublia, lui et ses indiens.
Georges alors poussa sa vie comme il put, c’est à dire sans éclat, en taoïste sceptique et souriant.
Et maintenant, revenu de tout,il part au loin à la chasse aux souvenirs…