Archives d’un auteur

le chant de la pluie

7 mars 2013,

 

 

La petite mousson avait débuté ce matin. Les gouttes cinglaient le toit de chaume de bambous et de palmes. L’eau dégoulinait de partout. nous pataugions pieds-nus dans les flaques tièdes et clapotantes avec jubilation.
Georges s’était accroupi contre la balustrade, attentif et souriant, il déchiffrait le chant de la pluie.
Le soir, il y eut un répit, nous étions dans un bain de touffeur poisseuse. Une mare s’était formée au bas des marches où déjà grouillait une vie sombre. Nous n’allumâmes pas les falots car la pluie avait repris doucement.

9 janvier 2013,


Nous vous souhaitons que le flux tendu de l’approvisionnement de votre super marché ne s’arrête pas inopinément.
Nous vous souhaitons d’améliorer vos capacités d’autosuffisance.
Nous vous souhaitons d’apprécier et de jouir de tout ce qui est vivant et vous entoure : plantes, animaux, humains et de vous-même.
Nous vous souhaitons de ne pas vous trouver emporté par les démarches suicidaires de l’espèce à laquelle vous appartenez.
Nous vous souhaitons d’exprimer ce qu’il y a de meilleur dans votre nature humaine et de réprimer ce qui n’est pas le meilleur.
Nous vous souhaitons d’avoir la chance de faire connaître le Sauvage à votre voisin de palier.
Nous vous souhaitons de nager avec souffle et vigueur jusqu’au rivage de 2014

Le Sauvage

Le rhinocéros… (histoire vraie)

8 décembre 2012,

Un riche anglais qui possédait château et un immense parc (à l’anglaise) y laissait vaguer des cerfs, des autruches, des tamanoirs, des lamas, des kangourous…

Dans une grande cage de style victorien tournait en rond, dans le sens des aiguilles d’une montre, un rhinocéros.

A force de tourner, il avait creusé le long des grilles une sorte de fossé.

Les cages n’étant plus à la mode, les visiteurs s’étonnaient et même se scandalisaient de cet emprisonnement.

On retira la cage, le rhinocéros recouvra la liberté, mais il continua sa ronde obstinément dans le même chemin, toujours dans le même sens…

De cette édifiante histoire, on peut tirer des morales contradictoires et se poser la question :

Pourquoi le sens des aiguilles d’une montre en Angleterre ?

Jacques Perret prétendait que les otaries du bassin du Jardin des plantes à Paris tournaient en sens inverse, étant natives de l’hémisphère sud…

Hibernation

6 décembre 2012,

Au solstice d’hiver, les naturels du pays mettent leurs enfants dans des nids-corbeilles qu’ils ferment à la cire.
Le froid les engourdit, ils s’enfoncent dans leurs rêves. Le soleil de printemps les réveillera.
Pendant les jours d’hiver, les vieux et les poètes, les savants et les voyageurs de commerce viennent là, celui-ci leur récite l’Odyssée ou la Véritable Histoire du Singe qui voulut être l’égal de Dieu, celui-là chante les vieilles ballades, joue de la vielle, de l’hélicon ou la cabrette, cet autre psalmodie les tables de multiplication et les logarithmes, les pèlerins racontent leurs voyages.
Ils appellent cela l’Hypnopédia. Ils n’ont pas l’Internet.

Un ange passe…

10 novembre 2012,

Les vaches, c’est prouvé, voient des choses que nous ne voyons pas : la preuve !

Eloge de la paresse

5 novembre 2012,

Par ce jour pluviassieux, brumeux, griseux,
rêver d’une sieste ailleurs
en écoutant le frottement soyeux des nuages sur le ciel…

Usage

4 octobre 2012,

Il était d’usage, qu’avant de reprendre sa route, le voyageur rédige en quelques mots sur une bande de papier, un testament.
A cet effet,on veillait à ce qu’encre et eau, pinceau et calame soient toujours disponibles.
Un écritoire et un plumier laqué l’attendaient dans les bambous.
Le vent et le soleil se chargeaient du reste…

Canicule

18 août 2012,


L’inspiration s’était tarie sous l’effet de la canicule, Georges siesta.

Dans son rêve, des cicindèles aux élytres turquoise s’accouplaient à des cétoines dorées, tandis que des typhoeus fiévreux démandibulaient des carabes diaphanes.

C’était un carnaval boschien de chimères de carapaces, d’antennes, de pinces, d’ocelles, de rostres, qui s’engendraient et se combinaient, célébrant  la prodigalité infinie de la Vie.

L’exemplaire des  » Chasses subtiles » d’Ernst Junger, écorné d’avoir été tant lu et relu, gisait à terre, ouvert page 177.

Stalker

7 août 2012,

Il avait beaucoup plu la veille, la nuit surtout.
Comme dans le « Stalker » de Tarkowski, Georges exerçait ses dons sur de grosses limaces rouges (Arion rufus) prélevées le matin même dans le jardin.
Plus tard, il  apprit qu’elles avaient le vestibule postérieur très gros, un pénis plus court et un canal déférent moins grêle qu’Arion ater dite « Loche noire », ce qu’il avait toujours soupçonné.