Cet article de François Veillerette paru dans le numéro de mai de S!lence
Et si la pollution finissait par rendre tout le monde idiot ?
On savait que l’exposition à de nombreux polluants chimiques pouvait être la cause de certains cancers plus fréquents, de problèmes de reproduction, de malformations génitales, etc… Une nouvelle étude scientifique et un rapport réalisé par l’ONG ChemTrust publiés en mars 2017 attirent notre attention sur un risque encore largement ignoré : les effets délétères des polluants perturbateurs endocriniens présents partout dans notre environnement sur le développement du cerveau chez le jeune enfant ou le fœtus.
L’étude scientifique, publiée dans la revue Scientific reports, a été menée par une équipe du Muséum national d’histoire naturelle / CNRS sous la houlette de la spécialiste des perturbateurs endocriniens Barbara Demeneix. Les scientifiques ont exposé pendant 72 heures des embryons de grenouilles à un mélange de 15 substances perturbatrices du système endocrinien couramment trouvées dans l’environnement comme le bisphénol A, des phtalates, des PCB, des composés perfluorés, le pesticide hexachlorobenzène…à des concentrations auxquelles on les retrouve dans le liquide amniotique.
Des effets sur le développement fœtal du cerveau
Résultat : ce mélange à faible dose a perturbé suffisamment les hormones thyroïdiennes pour influer sur le développement cérébral des embryons testés, induisant notamment une baisse du volume des neurones et des problèmes de mobilité. Les auteurs concluent que l’exposition à un mélange de produits chimiques ubiquitaires (que l’on trouve partout) pourrait avoir des effets délétères sur le développement fœtal du cerveau humain.
Le rapport de l’ONG Chem Trust nous alerte également : le cerveau est un organe complexe dont le développement fœtal ou durant les premières années de la vie peut être gravement perturbé par certains produits chimiques déjà pointés par l’étude citée plus haut et d’autres encore. Le spécialiste Philippe Grandjean, qui a revu le rapport, estime ainsi à plus de 200 ces molécules présentes dans notre environnement et menaçant le cerveau de nos enfants… de manière probablement irréversible ! Le scientifique alerte clairement : “Nous n’avons qu’une chance de développer notre cerveau, et nous devrons faire avec ce cerveau pour le reste de notre vie. La génération actuelle a la responsabilité de protéger les cerveaux du futur !”
Au regard de ces enjeux essentiels on comprend vraiment pourquoi la Commission européenne doit prendre conscience de la nécessité d’adopter une définition des perturbateurs endocriniens qui protège vraiment la santé humaine… sauf à accepter de sacrifier le développement de l’intelligence de générations entières pour conforter les profits de quelques grands groupes de la chimie !
François Veillerette